Successions
d'images se confondant pour ne former qu'un. Logo. Logo teinté
métallique s'agglutinant au cerveau de l'utilisateur. Design
minimal, asymétrique, l'équilibre tenace. Les nappes de synthé qui
l'escortent, l'arpeggiator formule basse soutenant le mouvement de la
synthèse s'en allant en guerre contre les non-convertis, les
non-assimilés, ceux qui dénoncent le Monde-Jeu, "une
bande de cinglés qui croit encore que l'ancien temps c'était bien"
comme j'ai pu le lire, les cris
de colère, d'indignation, les bouffées de narcissisme, collées à
l'envie sur les murs du réseau, doléances anonymes, emoticon tirant
la tronche en fin de phrase.
Épique, tel un shoot d'adrénaline matinal, et le ventre qui
gargouille, le tonitruement ordinaire précédant ce qui suit,
l'ouverture d'une fenêtre surgissant ni d'Adam ni d'Eve, une jeune
fille groovant sur un beat compressé dans les rues de la ville
création surpeuplée de LED et de néons, au même timing qu'elle,
elle, ses cheveux rouges bouclés, quelques reflets mauves, le regard
à la fois olympique et naïf, parfois amoureux, comme si elle était
la reine de Saba avec le visage de Gina Lollobrigida amélioré,
c'est-à-dire l'épicanthus et les lèvres parfaitement dessinés,
l'ensemble étant minimal, drapé d'une peau dorée, naturelle, comme
le souvenir agréable d'un périple dans quelques îles vierges, noix
de coco, papaye, sable chaud, maison sur pilotis, vu à l'écran, le
sponsor de l'émission phare, le couple vedette, Irina & Pavel,
les parrains de la petite, elle, nous fixant de son sourire coquin,
je bande, pas tellement pour ses beaux yeux, peut-être mécanique,
juste ça, comme l'apparition de la voix modulée basse fréquence du
speaker anonyme qui nous la présente : « elle s'appelle
Lala », oui, Lala, la grande gagnante du jeu dans le réseau.
Je ferme. Contiens ma rage. Surtout pas d'insultes à haute voix au
risque d'être dénoncé par les charmants voisins. Ouvre une page,
des pages, exécute quelques va-et-vient, mais rien qui me tente,
trop propres, situations surfaites, presque gênantes, quand surgissent les images
mentales légèrement floutées de l'inconnue avec qui j'ai
rendez-vous au Starbucks, Place Margaret Thatcher. Je souris. Les
premiers rayons de soleil illuminent la pièce de vie. Ça
ne peut être que le début d'une belle journée.
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